Rencontre : Véronique Mabrut
Directrice de la délégation Adour et Côtiers pour l’Agence de l’eau Adour-Garonne (départements 64,65,40)
Quelles sont les missions menées par l’Agence de l’eau Adour-Garonne et quels sont vos principaux travaux ?
L’agence de l’eau Adour Garonne est un établissement public de l’État qui redistribue sous forme d’aides les redevances perçues auprès des usagers, afin de financer des actions qui vont préserver et restaurer la qualité de l’eau potable et des milieux aquatiques.
En 50 ans notre mission a évolué. De 1960 à 1980, l’assainissement représentait l’essentiel de nos interventions ; c’est la période à laquelle de nombreuses collectivités se sont équipées de station d’épuration. Aujourd’hui, même si des travaux d’assainissement subsistent pour répondre à l’augmentation de la population, à l’urbanisation des territoires, les missions des agences se sont largement enrichies. Contribuer à restaurer les fonctionnalités des milieux aquatiques et humides, à maintenir des quantités d’eau suffisante dans les cours d’eau, sont des missions majeures pour préserver la vie biologique et endiguer les phénomènes d’inondations.
La réduction des pollutions diffuses en particulier d’origines agricoles et des pollutions industrielles est également un axe important de notre programme tout comme l’acquisition de données pour mieux connaître la qualité de nos cours d’eau et ainsi prioriser nos actions.
Quels sont, en 2020, les impacts visibles du dérèglement climatique dans notre région, et comment agissez-vous ?
L’impact le plus visible est très certainement la diminution du débit dans les différents cours d’eau du territoire avec de plus en plus d’assecs durant l’été. Grâce à l’étude prospective “Adour 2050”, sur un département comme les Pyrénées Atlantiques, on peut s’attendre à une baisse du débit de 20 à 30 % dans nos rivières, ruisseaux et gaves qui fait suite à une baisse tout aussi importante les 50 dernières années. C’est phénoménal. Dans ces conditions de changement climatique les normes doivent évoluer, pour que les milieux aquatiques ne soient pas touchés ou altérés par ces variations.
Ainsi les exigences sur le traitement d’une station d’épuration/assainissement demain, vont être bien supérieures à celles d’aujourd’hui ou d’hier ; le rejet doit rester compatible avec la capacité du milieu récepteur (souvent le cours d’eau) à diluer ces effluents.
Quelles sont les autres pressions qui s’exercent sur l’eau de notre territoire ?
Nous sommes sur un territoire agricole. L’agriculture, de plaine ou de montagne doit être prudente quant à l’usage des produits phytosanitaires, le travail du sol, l’irrigation pour ne pas exercer de pression négative sur l’eau. Même constat pour les pressions industrielles : la concentration des polluants dans les cours d’eau doit être abaissée pour rester compatible avec les débits en baisse. C’est donc un travail en continu et une vigilance permanente qui sont demandés à l’ensemble de la population toute catégorie socio professionnelle confondue. De cet engagement de tous dépend la qualité des eaux de baignade du département ! Les enjeux de l’eau obligent en effet à une solidarité des gens entre l’amont et l’aval. Concrètement, les pratiques des habitants des gaves de Gavarnie, Pau, Oloron, du Saison… leurs rejets directs ou indirects dans le cours d’eau ne doivent pas impacter la qualité des eaux de l’estuaire de l’Adour et des eaux de baignade de la côte basque.
Quel message souhaiteriez-vous faire passer aux consommateurs d’eau ?
L’eau est un bien commun de la nation, nous sommes tous responsables de sa gestion et sa gestion doit faire débat dans ce contexte de changement climatique. Cette question n’est pas qu’une affaire de spécialistes, l’ensemble de la population doit se sentir concernée et s’interroger sur ses usages de l’eau, revoir son comportement, ses habitudes. C’est grâce à l’effort fourni par tous dès maintenant que nous pouvons espérer préserver quantité, qualité de l’eau mais aussi vie aquatique et biodiversité sur nos territoires.